Les signes qui doivent faire évoquer une insuffisance vertébro-basilaire

Publié le 10/12/2001
Article réservé aux abonnés

PRATIQUE

1) Signes très évocateurs

- Trouble moteur à bascule (qui touche un côté, puis l'autre). Une atteinte motrice d'un bras, et une atteinte motrice d'une jambe dans le territoire opposé, ces deux symptômes pouvant d'ailleurs être transitoires.
- Signes cérébelleux : maladresse d'un membre, ataxie...
- Association d'une atteinte d'un nerf crânien (chute d'une paupière, mydriase...) avec un déficit de l'autre côté.

2) Signes évocateurs mais de diagnostic plus difficile

Certains signes sont évocateurs d'atteinte du territoire postérieur, mais de diagnostic plus difficile.
- Troubles visuels bilatéraux, type cécité corticale, avec conservation du réflexe photomoteur (alors qu'une atteinte oculaire bilatérale s'accompagne d'une perte du réflexe photomoteur).
- Hémianopsie latérale homonyme associée à une agnosie visuelle.
- Dysarthrie aiguë : trouble de l'expression orale sans trouble aphasique pendant quelques minutes, très évocateur bien que pas tout à fait spécifique.

3) Distinction difficile

Il existe des symptômes où il est difficile de distinguer la responsabilité du territoire vertébro-basilaire ou celui du territoire carotidien :
- déficit purement moteur, hémiplégie aiguë purement motrice, sans troubles sensitifs ou troubles aphasiques associés, peuvent être attribués à un déficit vertébral ou carotidien. L'imagerie est nécessaire au diagnostic ;
- les troubles sensitifs hémicorporels (Pure Sensory Stroke des Américains) ont très souvent une origine vertébro-basilaire, mais parfois quelques accidents corticaux situés dans le territoire carotidien peuvent se présenter sous la forme d'un tableau clinique identique.

4) Situation clinique pathognomonique

C'est un trouble sensitif associé à un trouble de la gustation du même côté (dans le thalamus se réunissent les fibres de la sensibilité et de la gustation, donc on est forcément dans le territoire postérieur).

5) Tableaux évolutifs

- Tableaux pouvant évoluer sous formes d'accidents déficitaires transitoires (< 24 heures) en se répétant. Exemple : succession de symptômes tels que des troubles oculomoteurs puis un déficit du côté opposé. Dans ce cas, la signature d'une origine postérieure est certaine.
- Accidents s'aggravant en quelques jours, beaucoup plus fréquemment que dans le territoire carotidien (exemple syndrome de Wallenberg* aigu + trouble sensitif de type spino-thalamique qui touche la jambe et souvent une partie du tronc).
D'autres accidents comportent un déficit moteur puis, quelques heures ou jours après une dysarthrie, un trouble cérébelleux. Tout se passe comme s'il y avait une migration de caillot ou des modifications de régime circulatoire allant d'un territoire à l'autre. Cette situation est assez caractéristique des déficits vertébro-basilaires.

6) Dissection et vol

Il existe deux causes relativement plus fréquentes dans le territoire postérieur, notamment chez le sujet jeune : la dissection de l'artère vertébrale et le syndrome de vol sous-clavier.
- Dans la dissection, apparaissent de façon aiguë des douleurs cervicales (souvent après mouvement d'hyperextension du cou ou de rotation), puis un syndrome de Claude Bernard Horner, et, éventuellement, un déficit neurologique. Le diagnostic est suspecté sur le doppler (sténose progressive d'une artère), et affirmé par l'IRM (hématome de la paroi artérielle sur coupes axiales).
- Syndrome de vol sous-clavier. Dans le cas d'une artère sous-clavière très sténosée à son origine, cela entraîne une chute du débit sanguin dans le bras. A l'effort, le débit sanguin appelé, ne pouvant traverser l'artère sous-clavière, est dévié à contre-courant depuis l'artère vertébrale. Les symptômes apparaissent électivement à l'effort, soit vertébro-basilaire, soit d'origine carotidienne (la carotide fournissant indirectement du sang dans le territoire basilaire).

7) Faux amis, risques de faux diagnostics

- Vertige aigu. A priori, un vertige aigu isolé n'est pas un accident vertébro-basilaire. Exemple, vertige positionnel bénin, qui parfois guérit après chirurgie des artères cervicales, car la position chirurgicale les améliore. L'association athérosclérose + vertige positionnel bénin (tous deux fréquents) ne doit pas aboutir à une chirurgie vasculaire !
- Etat confusionnel aigu : il est possible qu'un accident touchant la partie réticulée du tronc cérébral se manifeste par un état confusionnel aigu, mais quand cet état est isolé, il faut systématiquement rechercher une autre cause : encéphalopathie carentielle, confusion médicamenteuse, hématome sous-dural...

<*L>* Syndrome de Wallenberg : vertige aigu, troubles de la déglutition, douleurs faciales, syndrome de Claude Bernard Horner, syndrome cérébelleux.

Dr Bertrand DEMANGEON Propos recueillis auprès du Pr Pierre Cesaro, hôpital Henri-Mondor, AP-HP, Paris

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7028