LE TRAITEMENT de la leucémie myéloïde chronique (LMC) a beaucoup évolué ces trente dernières années du fait de la compréhension des mécanismes de la maladie et des découvertes thérapeutiques. Le tournant majeur dans la prise en charge de la LMC s'est produit en 1998 avec le début des premiers essais de Glivec (imatinib), premier traitement ciblé sur l'anomalie moléculaire de la LMC, la protéine BCR-ABL. Avec près de 90 % des patients toujours en vie à cinq ans et un taux de survie jamais observé auparavant, Glivec est devenu le traitement de référence de cette affection.
Néanmoins, pour une minorité de patients, la prise en charge par l'imatinib s'est révélée inefficace ou impossible ; des résistances ont été observées, la maladie évolue alors vers une phase d'accélération et de transformation aiguë. Pour d'autres, une intolérance à l'imatinib empêchait de poursuivre ce traitement.
L'efficacité démontrée de Tasigna offre donc une nouvelle perspective thérapeutique tant pour les patients résistants que ceux intolérants à l'imatinib. Sa mise au point est liée à une meilleure compréhension des mécanismes moléculaires impliqués dans l'action de Glivec. Des modifications structurelles de l'imatinib ont abouti au développement de Tasigna.
Inhibiteur de tyrosine kinase de 2e génération.
Tasigna est un inhibiteur de tyrosine kinase de 2e génération, exerçant une action inhibitrice, ciblée et sélective contre Bcr-Abl, responsable majeur de la LMC Ph+. Cette molécule est dotée d'une grande spécificité n'ayant pas ou peu d'effet contre la plupart des autres protéines kinases, sauf les kinases des récepteurs PDGF, Kit, Ephrine.
L'AMM obtenue repose sur les résultats d'une étude clinique de phase II multicentrique, non contrôlée, portant sur 400 patients atteints de LMC Ph+ en phase chronique ou accélérée, résistants ou intolérants à Glivec, dont le critère principal était la réponse cytogénétique (RCy).
Tasigna était administré à raison de 400 mg deux fois par jour, la dose pouvant être poussée jusqu'à 600 mg, deux fois par jour, en fonction de l'efficacité ou la tolérance. Chez près d'un patient sur deux en phase chronique, après un traitement de 11 mois, une réponse cytogénétique majeure (RCyM) est enregistrée. La réponse est complète (RCyC) chez 34,4 % des sujets. Que les patients soient résistants ou intolérants à l'imatinib, les résultats sont comparables.
On note que l'efficacité de Tasigna est rapide et durable : les délais médians d'obtention de la RCyM et de la RHC (réponse hématologique complète) sont respectivement de 2,8 mois et de 1 mois et les durées médianes de ces réponses n'ont pas été atteintes. Le taux de survie globale est estimé à 95 %, celui sans progression à 12 mois est de 76,5 %.
On relève que 24 mutations Bcr-Abl différentes ont été retrouvées chez 45 % des patients en phase chronique après échec par imatinib. Tasigna a montré son efficacité chez les patients porteurs de ces diverses mutations associées à une résistance à l'imatinib, excepté la mutation T315, dite la mutation du diable.
Une réponse hématologique globale (RHG) a été confirmée chez 42 % des patients en phase accélérée, une RHC pour 25 % des patients et 10 % sont repassés à la phase chronique. Une réponse cytogénétique majeure a été obtenue chez 27 % des patients. Ces réponses ont été rapides (1 mois pour la réponse hématologique et deux mois pour RCy). Le taux de survie globale à 12 mois est de 57 %.
Les dernières données (congrès de l'European Hematology Association, juin 2008) confirment l'efficacité de Tasigna, avec, pour la LMC en phase chronique, après une durée moyenne de 13 mois, une RCyM pour 57 % des patients ; une réponse complète chez 41 % des patients ; une survie globale à 18 mois de 91 %. Pour la LMC en phase accélérée, on constate après 7 mois de traitement, chez les patients : une RHG chez 54 %, une RHC chez 26 %, une RCyM chez 31 %, une RCyC chez 19 % et une survie globale à 12 mois estimée à 81 %.
Quant à la tolérance, les effets indésirables extra-hématologiques le plus fréquemment rentrés sont une éruption, un prurit, des nausées, une fatigue, des spasmes musculaires et des oedèmes périphériques. Les effets hématologiques induits les plus fréquents sont des thrombopénies, des neutropénies… On a également relevé très peu d'intolérance croisée avec le Glivec.
Une amélioration du SMR.
Pour le Pr François-Xavier Mahon, «les résultats cliniques et le profil de tolérance favorable de Tasigna sont très encourageants et vont permettre d'améliorer la prise en charge des patients résistants ou intolérants au Glivec».
La commission de transparence de l'HAS a considéré que Tasigna (nilotinib) apportait une amélioration du SMR de niveau II pour la LMC en phase chronique et de niveau I pour la LMC en phase accélérée (20 février 2008).
Tasigna se présente sous forme de gélules dosées à 200 mg, pris à distance des repas.
D'après une conférence de presse de Novartis avec, parmi les intervenants, le Pr Josy Rieffers, directeur général de l'institut Bergonié de Bordeaux, le Pr François-Xavier Mahon, laboratoire d'hématologie à l'université Victor-Segalen, Bordeaux, le Pr François Guihot (CHU Poitiers).
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