LES PARTISANS de la psychologie biologique devraient être confortés dans leurs certitudes et nombre de parents être rassurés. L'hyperactivité des enfants ne serait pas liée à des manquements dans l'éducation, mais à un retard de la maturation de certaines structures cérébrales, si on en croit un travail mené par l'équipe du Dr Philip Shaw de la section pédo-psychiatrique du NIH (National Institute of Health, Etats-Unis). Les auteurs ont mesuré par IRMa 40 000 sites corticaux chez 223 enfants atteints de syndrome d'hyperactivité et 446 témoins. L'analyse morphologique a été menée au moins deux fois à trois années d'intervalle. Le but du travail : estimer la vitesse de maturation du tissu cortical en analysant les modifications d'épaisseur au cours de la croissance. Jamais dans son analyse l'équipe du Dr Shaw n'a prétendu analyser la qualité de la maturation cérébrale : les chercheurs se sont focalisés sur la cinétique de maturation. Physiologiquement, l'épaisseur corticale augmente au cours de l'enfance en commençant par les régions sensitives et motrices, puis, à la période de préadolescence, les régions des ordres complexes et des fonctions psychomotrices situées dans les régions frontales sont concernées. Or ces aires cérébrales sont aussi impliquées dans la régulation des actions et des pensées considérées comme inappropriées, ainsi que dans l'attention, la mémoire et le contrôle des mouvements. Autant de fonctions qui peuvent être affectées par l'existence d'un syndrome d'hyperactivité.
La réalisation de tâches complexes.
La maturation des circuits neuronaux frontaux et temporaux qui intègrent l'information des aires sensorielles et permettent la réalisation de tâches complexes est, par exemple, particulièrement décalée chez ces jeunes. La partie médiane du cortex préfrontal acquiert sa morphologie définitive avec un retard allant jusqu'à 5 ans par rapport aux sujets témoins. Seules les régions motrices semblent maturer de façon plus rapide chez les sujets souffrant d'hyperactivité. Les auteurs soulignent que ces anomalies sont foncièrement différentes de celles rencontrées dans d'autres affections neurologiques qui touchent les enfants telles que l'autisme, caractérisé par une augmentation précoce de l'épaisseur du cortex. Ce travail va dans le sens d'un fondement biologique à l'hyperactivité infantile et il laisse à penser que les troubles des enfants pourraient régresser de façon spontanée à l'adolescence.
Mathématiques, lecture, attention.
On peut rapprocher de cette étude, un travail publié dans « Developmental Psychology » qui analyse le lien entre trois éléments clés du comportement socio-scolaire en fin de maternelle et la réussite à l'école au moment de l'adolescence. L'équipe du Dr Crista Japel (Québec) a analysé des indicateurs du niveau de préparation à l'école primaire : capacité à reconnaître des lettres et des sons, richesse du langage oral, habilité à communiquer, prélatéralisation, numération, addition, niveau d'attention dans la réalisation d'une tâche, niveau d'activité, capacité à verbaliser les problèmes, socialisation. L'équipe a regroupé les données de six grandes études au cours desquelles les enfants avaient été évalués à l'âge de 5-6 ans et une nouvelle fois entre 10 et 13 ans. Globalement, dans le système scolaire nord-américain, ce sont les enfants dont les aptitudes mathématiques étaient marquées à l'entrée en primaire qui réussissent le mieux à l'adolescence. Les autres facteurs prédictifs sont ensuite les capacités à la lecture et l'attention. En revanche, l'existence d'une hyperactivité – rapportée par les parents ou les enseignants – n'influe pas sur le pronostic scolaire de façon significative. C'est aussi le cas des capacités de socialisation, de verbalisation et de résolution des problèmes. Enfin, même les enfants que les parents considèrent comme souffrant de troubles du comportement au cours de la petite enfance réussissent comme les autres à l'école. Dans ces conditions, on ne pourra plus jamais dire que tout est joué avant l'âge de 7 ans et a fortiori dès le début de la maternelle.
« Proc Natl Acad Sci USA », en ligne.
« Developmental Psychology », 2007, 43, 6 : 1428-1446.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature