EN 1985, LE PREMIER ministre, Laurent Fabius, lançait le programme « Informatique pour tous ». En oubliant dans ce «tous» les enfants hospitalisés, estime à l’époque Anne Dunoyer de Segonzac, qui crée alors l’association L’enfant à l’hôpital.
L’idée est d’équiper en informatique (et, plus tard, Internet) les jeunes patients, de les former et de les accompagner. «L’ordinateur est un merveilleux outil pédagogique de lecture, d’écriture et même de lutte contre le handicap. Et c’est encore plus évident avec Internet», indique la créatrice et déléguée générale.
Dix forums en route.
L’association se dote d’une plate-forme Internet privée, qu’elle baptise au départ Canari, maintenant Kolibri. «Petite université interactive», Kolibri permet de mettre en communication les enfants dans les hôpitaux et des scientifiques et voyageurs partis à l’autre bout du monde.
L’association bénéficie de l’aide de stagiaires, jeunes polytechniciens en service civil ou venant d’autres grandes écoles d’ingénieurs et de commerce, qui assurent, à la demande des établissements, l’installation des ordinateurs et de Kolibri dans les services pédiatriques. Cinquante stagiaires ont sollicité l’association. Au chevet des petits malades, ils les incitent à participer aux forums de discussion.
Une dizaine de forums sont actuellement en route. C’est ainsi que les enfants peuvent suivre les aventures de deux jeunes gens qui parcourent Singapour-Paris à vélo ou encore dialoguer avec d’autres aventuriers partis pour l’Amérique du Sud autour d’un projet sur le développement durable. Et, à partir de janvier 2007, ils vont pouvoir vivre par radio interposée les émotions scientifiques de Camille Fresser en terre Adélie.
Ici, terre Adélie.
Camille Fresser est un jeune ingénieur «généraliste». En 2005, il réalise un stage de fin d’études auprès du médecin-explorateur Jean-Louis Etienne en expédition à Clipperton (île du Pacifique, à l’ouest du Mexique), et c’est là qu’il entame sa collaboration avec l’association L’enfant@l’hôpital. «Je passais des heures derrière mon ordinateur, sans me rendre compte parfois de la chance que j’avais d’être là où j’étais. Les enfants posaient des questions géniales, qui me faisaient prendre conscience de certaines choses.»
Cette fois, le jeune ingénieur a été nommé responsable de l’observatoire géographique pour une nouvelle expédition en terre Adélie, sur l’île des Pétrels, qui se penchera une année durant sur le magnétisme terrestre, le rayonnement cosmique et divers phénomènes de glaciologie. Une fois par semaine, les enfants pourront poser leurs questions au scientifique par courriels (de poids léger), certaines seront enregistrées oralement, et les réponses seront déposées depuis la terre Adélie sur un répondeur téléphonique, puis montées afin de reconstituer une interview écoutable à tout moment par les enfants. Des échanges pourront être organisés aussi avec le boulanger ou le mécanicien ou… les (manchots) empereurs de l’île. De l’hôpital à l’Antarctique, il n’y a qu’un pas, ou presque. Franchi grâce aux nouvelles technologies.
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