DE NOTRE CORRESPONDANTE
LA DÉGÉNÉRESCENCE maculaire liée à l’âge (Dmla) affecte environ une personne sur trois au-delà de 75 ans dans le monde développé. Elle se manifeste par une baisse progressive de la vision centrale, empêchant de lire, de conduire, ou de reconnaître les visages.
Bien que la forme néovasculaire (ou exsudative) de la Dmla ne représente que 10 % des cas, elle est responsable de la grande majorité de la perte visuelle associée à cette affection oculaire.
Pour cette raison, un traitement efficace de la néovascularisation de la Dmla est recherché depuis plus de vingt ans. Une avancée a été enregistrée il y a cinq ans grâce à la thérapie photodynamique (qui consiste en une occlusion photochimique locale des vaisseaux nourrissant la membrane néovasculaire. Ce traitement peut ralentir la progression de la perte visuelle, mais peu de patients présentent une amélioration de l’acuité visuelle.
Inhibition du Vegf.
Le Vegf (Vascular Endothelium Growth Factor), protéine qui favorise l’angiogenèse et la perméabilité vasculaire, semble être un dénominateur commun à toutes les formes néovasculaires de la Dmla.
Plusieurs molécules inhibant le Vegf ont déjà été développées. Deux de ces agents, le ranibizumab et le bevacizumab, sont des anticorps monoclonaux recombinants dirigés contre le Vegf.
Le ranibizumab est un fragment d’anticorps monoclonal humanisé (Fab) de 48 kD ; le bevacizumab est un anticorps complet de 149 kD. Le ranibizumab vient d’être approuvé aux Etats-Unis et en Suisse pour le traitement des Dmla néovasculaires.
Les deux grandes études de phase III évaluant l’efficacité du ranibizumab dans le traitement de la Dmla néovasculaire sont publiées cette semaine dans le « New England Journal of Medicine ».
L’étude MARINA, conduite par Rosenfeld (université de Miami) et coll., est une étude multicentrique américaine, en double insu, qui a évalué deux doses de ranibizumab (0,3 mg ou 0,5 mg) en injections intravitréennes une fois par mois pendant deux ans qui ont été comparées à des injections placebo. Elle porte sur 716 patients affectés d’une néovascularisation occulte ou peu classique.
Stabilisation et gain.
A un an, une stabilisation de la vision (perte de moins de 15 lettres ou 3 lignes sur le tableau ETDRS) – l’objectif primaire d’efficacité – a été obtenue chez 94,5 % des patients traités, par rapport à seulement 62 % des patients témoins. Mieux encore, une amélioration de l’acuité visuelle (gain de 15 lettres ou plus) a été observée chez 25 % des patients traités par 0,3 mg de ranibizumab, et 34 % de ceux traités par la dose de 0,5 mg, comparé à 5 % des patients témoins. Les patients traités par ranibizumab ont gagné en moyenne sept lettres d’acuité visuelle (plus d’une ligne gagnée), tandis que les patients témoins ont perdu en moyenne 10 lettres (2 lignes).
Le bénéfice de l’acuité visuelle est maintenu à deux ans.
L’étude ANCHOR, dirigée par le Dr Brown (Vitreoretinal Consultants, Houston) et comprenant parmi les signataires le Dr Gisèle Soubrane (université de Paris-XII, Créteil), est une étude multicentrique internationale de deux ans. Elle a comparé deux doses de ranibizumab (0,3 et 0,5 mg) à la thérapie photodynamique, chez 416 patients atteints de néovascularisation à prédominance classique.
Les résultats à un an, les seuls disponibles pour l’instant, sont similaires à ceux de l’étude MARINA. La stabilisation de la vision est obtenue chez 94 à 96 % des patients traités par ranibizumab, contre 64 % des patients traités par la thérapie photodynamique.
L’acuité visuelle s’est améliorée de quinze lettres ou plus chez 35 % des patients traités par 0,3 mg de ranibizumab et 40 % des patients traités par 0,5 mg, contre 5 % des patients traités par thérapie photodynamique. Le patient moyen recevant le ranibizumab a gagné environ deux lignes d’acuité visuelle à un an, tandis que le patient moyen recevant la photothérapie dynamique a perdu environ deux lignes.
Des études complémentaires.
Dans les deux études, la complication la plus redoutée du traitement, une infection bactérienne intraoculaire, survient à une fréquence relativement faible de 1 pour 2 000 injections (endophtalmite chez 1 % des patients et uvéite chez 1,3 % des patients).
«Comme avec les résultats les plus passionnants, des questions demeurent qui méritent d’être étudiées», note dans un éditorial le Dr Edwin Stone (université d’Iowa). «Une comparaison du ranibizumab et du bevacizumab est justifiée», estime-t-il, ainsi qu’une étude évaluant un traitement plus court (induction et suivi).
« New England Journal of Medicine », 5 octobre 2006, pp. 1419, 1432, 1409 et 1493.
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