Pour la première fois, selon ses auteurs, une étude montre une relation entre le tabagisme passif et une discrète hypoacousie chez les adolescents. Il existe une élévation du seuil auditif avec une perte dans les fréquences graves, le tout dans un contexte de relation effet-dose.
L’enquête a été menée auprès d’adolescents de 12 à 19 ans de la cohorte américaine NHANES (National Health and Nutrition Examination Survey), en 2005 et 2006. Les 1 533 participants ont tous bénéficié d’une audiométrie, ainsi que d’un dosage de la cotinine sérique (reflet de leur niveau d’inhalation). Aucun n’était fumeur.
Il ressort des tests que pour les fréquences aiguës (3, 4, 6 et 8 kHz) le seuil d’audition est majoré. Il apparaît en outre un taux plus élevé de perte auditive unilatérale pour les basses fréquences (0,5, 1 et 2 kHz), ce risque est multiplié par 1,83 par rapport à des témoins non exposés. Plus la cotininémie est élevée plus la prévalence de la perte auditive (au moins 15 dB) s’élève, ainsi le risque est multiplié par 2,72 pour ceux du quartile d’intoxication le plus élevé (0,858 µg/l< cotininémie< 15 µg/l). Enfin, 82 % des adolescents concernés ne sont pas conscients de leur déficit.
Ce constat, expliquent Anil K. Lalwani et coll. (New York), suggère que le déficit de l’oreille interne peut commencer très tôt dans la vie. L’atteinte unilatérale ne serait que le début d’une perte auditive susceptible de se bilatéraliser et de s’aggraver. Ils ajoutent que le tabagisme passif est responsable d’otites dans la petite enfance, elles-mêmes facteur de risque de déficience auditive. De plus, le tabagisme in utero altère le développement de la cochlée et du nerf vestibulocochléaire. Sur ce point, notons une faiblesse de l’étude qui n’a pu tenir compte du niveau d’intoxication pendant la vie fœtale. De même, elle n’a pu évaluer l’exposition au bruit des adolescents (baladeurs, concerts, discothèque…).
Plusieurs mécanismes explicatifs sont proposés décrivant une action du tabac : sur la microcirculation, sur certaines fonctions endocrines et sur le stress oxydatif. Surtout l’atteinte microvasculaire pourrait affecter l’oreille interne particulièrement sensible à une bonne vascularisation et donc à l’hypoxie. Enfin, la nicotine elle-même ou d’autres composés chimiques pourraient avoir une activité directement toxique sur l’oreille interne. Comme le rappellent d’ailleurs les auteurs, le tabac a déjà été associé à une accélération de la perte auditive chez l’adulte.
« Arch Otolaryngol Head Neck Surg », vol. 137, n° 7, pp. 655-662.
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