En 2007, plusieurs antifongiques systémiques sont disponibles à l'hôpital : amphotéricine B et ses dérivés lipidiques (complexe lipidique et amphotéricine B liposomale), 5-fluorocytosine, fluconazole, itraconazole, voriconazole, posaconazole, caspofungine. Deux nouveaux venus devraient les rejoindre dans les prochaines années (micafungine, anidulafungine). Ces molécules qui agissent sur des cibles distinctes (membrane cellulaire, paroi, synthèse de l'ergostérol, synthèse protéique) permettent de traiter des infections fongiques aux agents très divers. Mais, en dépit de l'existence des traitements, l'incidence de la mortalité liée aux mycoses systémiques reste élevée. «Les limites potentielles des traitements antifongiques sont désormais bien identifiées. Le spectre de certaines de ces molécules reste limité. De premiers cas de moindre sensibilité ont été récemment décrits et de nouvelles espèces à CMI haute ou inconnue émergent sous antifongiques en particulier chez les immunodéprimés», indique le Pr Olivier Lortholary, responsable adjoint du Centre national de référence de la mycologie et des antifongiques à l'Institut Pasteur de Paris et chef de service des maladies infectieuses et tropicales à l'hôpital Necker-Enfants-Malades. Par ailleurs, la question de la toxicité de certains médicaments tels que l'amphotéricine B et leurs particularités pharmacologiques (passage de la barrière hémato-encéphalique, interférences médicamenteuses ou non disponibilité par voie orale) rend leur prescription délicate. Enfin, la question du coût des nouvelles molécules peut poser problème.
L'amphotéricine B, polyène à usage topique ou systémique (I.V.) agit par fixation sur l'ergostérol membranaire. Son spectre d'action est large – levures, filamenteux y compris les mucorales, dimorphiques –, mais elle reste inactive sur Candida lusitaniae, Scedosporium spp., Aspergillus terreus et les dermatophytes. Fongicide in vitro, l'amphotéricine B est dotée d'une demi-vie plasmatique de 24 à 48 heures, son élimination est lente et sa diffusion tissulaire est bonne. «Si ce médicament est la molécule antifongique de référence, sa situation de monopole doit être désormais discutée; d'une part, en raison de sa toxicité, de l'existence d'infections à champignons moins sensibles voire résistants; et, d'autre part, du fait de la mise sur le marché de nouvelles molécules compétitives actives sur les aspergilloses invasives et des candidoses systémiques», précise le Pr Lortholary. Les effets indésirables de l'amphotéricine B sont désormais bien répertoriés : certains sont liés à la libération de cytokines pyrogènes (fièvre, tremblements, céphalées, troubles digestifs, irritation veineuse, courbatures, collapsus cardio-vasculaire ou bronchospasme), d'autres sont en rapport avec la toxicité viscérale (insuffisance rénale, troubles électrolytiques, anémie, arachnoïdite, toxicité cardiaque ou hépatique).
Afin de limiter la toxicité de l'amphotéricine B, des formes lipidiques ont été commercialisées. Leur structure physique repose sur l'adjonction de liposomes, de rubans lipidiques ou de disques lipidiques. Elles agissent sur les aspergilloses, les candidoses systémiques et des cryptococcoses neuro-méningées des sujets VIH en cas d'insuffisance rénale ou d'altération de la fonction rénale (AmBisome). Mais elles ne sont pas exemptes de toxicité.
Le fluconazole anti-levures, inactif sur Aspergillus et sur d'autres filamenteux, est bien toléré et n'interagit que rarement avec les autres médicaments. L'itraconazole est un antiaspergillaire qui agit aussi sur les champignons dimorphiques, les levures, les dermatophytes et les autres filamenteux. Actif par voie orale ou intraveineuse, il interagit avec de nombreux médicaments.
Le voriconazole, un triazolé
Le voriconazole, antifongique systémique de la famille des triazolés, est actif contre les aspergilloses invasives, les infections invasives graves à candida et d'autres infections fongiques graves comme celles à Fusarium ou Scedosporium spp. Indiqué chez l'enfant de plus de deux ans et chez l'adulte, il peut être administré en première intention chez l'immunodéprimé. Disponible par voie orale et intraveineuse, il peut être prescrit en association avec la plupart des anti-infectieux et des immunosuppresseurs (sous réserve d'une surveillance intensive, mais il est contre-indiqué avec le sirolimus). Sa clairance est surtout hépatique, il est métabolisé par plusieurs isoenzymes du cytochrome P450. Des précautions d'emploi doivent donc être respectées. L'action du voriconazole sur les aspergilloses invasives a été prouvée ainsi que sur les candidémies, les infections à scedosporium et Fusarium sp.
Le posaconazole, autre triazolé
Le posaconazole, triazolé proche de l'itraconazole, inhibe également la lanostérol 14 alpha déméthylase (CYP51A) et bloque la synthèse de l'ergostérol. Son efficacité est donc améliorée par rapport à l'itraconazole par suite d'une meilleure affinité de la chaîne latérale avec l'enzyme CYP51A et de sa résistance aux pompes à efflux. Utilisable chez l'insuffisant rénal, il doit être administré en augmentant progressivement les doses qui doivent être administrées au cours d'un repas. Le posaconazole est indiqué en deuxième intention dans les aspergilloses, les fusarioses, les eumycétomes et les chromoblastomycoses, les coccidioïdomycoses, les candidoses oropharyngées et oesophagiennes des immunodéprimés, les zygomycoses et en prophylaxie des aspergilloses invasives.
La caspofungine, une échinocandine
La caspofungine fait partie de la famille des échinocandines qui interagissent avec l'ergostérol. Sa biodisponibilité par voie orale est limitée. Elle est éliminée par voie hépatique. La capsofungine est efficace dans le traitement de différentes candidoses : C.albicans, C.galabrata, C.tropicalis, C.krusei et C.lusitaniae. Elle peut donc être utilisée pour traiter une candidose systémique, une aspergillose et en traitement empirique chez les patients neutropéniques fébriles.
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