POUR 2005, le nombre de nouveaux cas de cancers est estimé à 320 000. Chez l'homme, le cancer le plus fréquent est, depuis 2000, celui de la prostate, qui a devancé le cancer du poumon et le cancer colo-rectal. Chez la femme, le cancer du sein est toujours au premier rang, suivi par les cancers du côlon-rectum et du poumon. Le cancer de la prostate est aussi devenu le plus fréquent tous sexes confondus, avec 62 000 nouveaux cas, devant le cancer du sein (50 000). Mais le cancer le plus meurtrier est toujours celui du poumon, qui a tué 26 624 personnes en 2005.
En vingt-cinq ans, le nombre de cas a quasi doublé. En 1980, il était au total de 170 000. Chez l'homme, la progression est de 93 % et chez la femme de 84 %. L'évolution de la population française explique en partie cette hausse. Les épidémiologistes estiment que 25 % de l'augmentation du nombre de cas est due à l'augmentation de la population et 20 % à son vieillissement. Le reste étant lié à l'augmentation du risque (52 % chez l'homme, 55 % chez la femme, avec, notamment, le tabagisme).
Dans le même temps, le nombre de décès a augmenté de 13 %, une proportion bien inférieure à celle que laissaient prévoir l'augmentation et le vieillissement de la population française, à savoir 37 %. En vingt-cinq ans, le risque de mortalité a donc en fait diminué de 24 %, près d'un quart.
Cette divergence des deux courbes, celle de l'incidence et celle de la mortalité, s'explique en particulier par l'évolution croisée des cancers les plus agressifs (oesophage, estomac, voies aérodigestives supérieures), en recul ces dernières années, et des cancers de pronostic plus favorable, pouvant être diagnostiqués très précocement (sein, prostate), en hausse.
Chez la femme, la moitié des cas supplémentaires sont ceux qui touchent le sein et, chez l'homme, 70 % des cas supplémentaires sont représentés par les tumeurs de la prostate. A côté des évolutions démographiques, les modifications des pratiques médicales et, en particulier l'extension du dépistage, jouent ainsi un rôle important dans l'augmentation du nombre de cancers. Bien sûr, cela n'explique pas tout et la recherche doit s'intensifier sur le rôle possible des modifications de l'environnement.
Les principaux cancers
– Cancer du poumon : 78 % des cas sont encore masculins ; mais l'incidence et la mortalité sont en baisse chez l'homme et en hausse importante chez la femme, à cause du tabac, ce qui justifie la poursuite des efforts de prévention primaire dans ce domaine.
– Cancer du sein : l'incidence progresse de 2,4 % en moyenne par an (mais l'étude rappelle l'évolution toute récente à la baisse) ; la mortalité décroît, elle, doucement, de 1,3 % en moyenne chaque année. Cela grâce au dépistage et à l'amélioration de la prise en charge thérapeutique.
– Cancer de la prostate : le plus fréquent des cancers, celui dont l'incidence a le plus augmenté (+ 6,3 % par an) et qui représente un tiers des cas masculins. Le dépistage explique en grande part cette évolution, la hausse de l'incidence, maximale pour les 50-70 ans, étant à rapprocher de l'extension du dosage systématique du PSA (au Danemark, où cette pratique est déconseillée, l'incidence a beaucoup moins progressé). Le bénéfice de sa pratique systématique pour la population générale n'a cependant pas été scientifiquement démontrée ; on attend les résultats des essais randomisés en cours.
– Cancer colo-rectal : c'est le troisième cancer le plus fréquent ; son incidence est stable en France, alors qu'elle est en baisse aux Etats-Unis, mais la mortalité recule. Le dépistage doit être généralisé à partir de cette année.
– Mélanome : sur l'ensemble de la période 1980-2005, l'incidence est en hausse (4,7 % chez l'homme et 3,4 % chez la femme en moyenne par an), mais elle semble se stabiliser ces dernières années, et la mortalité a même tendance à baisser chez la femme, grâce notamment à la sensibilisation de la population à son diagnostic précoce.
– Cancer du col utérin : l'incidence et la mortalité sont en baisse constante, résultat de la pratique répandue du dépistage par frottis.
– Cancers des voies aéro- digestives supérieures (lèvres, bouche et pharynx) : avec 12 270 nouveaux cas en 2005 et 4 000 décès, ils restent assez fréquents, malgré une baisse drastique chez l'homme, comme pour le cancer de l'oesophage, due à la diminution de la consommation d'alcool observée depuis les années 1950 et, dans une moindre mesure, de celle du tabac. Chez la femme, en revanche, et pour les raisons inverses, l'incidence est en hausse.
– Cancer de la thyroïde : les femmes sont principalement touchées, avec 76 % des cas. L'incidence a augmenté, tandis que la mortalité a baissé et est estimée à 0,3 pour les deux sexes. Les évolutions s'expliquent par une augmentation des formes papillaires, de meilleur pronostic, et une diminution des cancers anaplasiques, au pronostic plus sombre, et par les progrès des techniques d'imagerie (cytoponction échoguidée), qui permettent une détection de plus en plus précoce.
– Lymphomes malins non hodgkiniens : l'incidence a régulièrement augmenté depuis 1980, pour se stabiliser durant les cinq dernières années, sans que l'on puisse l'expliquer, les facteurs de risque étant encore mal connus. L'amélioration de la prise en charge thérapeutique peut, en revanche, rendre compte de la baisse de la mortalité observée depuis les années 1990.
* Sur le site www.invs.sante.fr/surveillance/cancers et prochainement dans « la Revue d'épidémiologie et de santé publique ».
Les données
L'étude sur l'évolution des cancers ces vingt-cinq dernières années a été rendue publique hier par l'Institut de veille sanitaire avec FRANCIM, le réseau français des registres de cancer, les Hospices civils de Lyon, qui gèrent la base de données du réseau, et l'Institut national du cancer.
Les données qui ont servi à l'estimation de l'incidence sont issues de la base de plus de 600 000 cas de cancers diagnostiqués entre 1975 et 2003 par l'ensemble des registres. Mais ces derniers ne couvrent pas l'ensemble de la population et ne sont peut-être pas représentatifs de celle-ci. Une modélisation statistique a permis une extrapolation, en se fondant également sur les données de mortalité nationales fournies par le CépiDc. Quant aux chiffres 2005, ils sont issus de prédictions à court terme réalisées là aussi avec un modèle statistique.
Le cancer en 2005 chez l'homme
Le cancer en 2005 chez la femme
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