C'EST MAINTENANT une donnée fiable : moins de 50 % des patients atteints d'un cancer décèdent des conséquences directes ou indirectes de leur maladie dans les cinq ans qui suivent le diagnostic. Le chiffre phare qui ressort de la vaste enquête réalisée sur la période 1989-1997, sur une population de 205 000 personnes, par le réseau Francim (voir encadré), avec le soutien de la Ligue contre le cancer, est sans conteste facteur d'espoir. On meurt moins de la maladie qu'on n'en guérit.
Attention toutefois aux généralisations. Au-delà de ce chiffre symbolique, l'étude révèle dans ses détails des disparités importantes : les patients sont loin d'être égaux devant les chances de survie. Premier paramètre, le sexe. La survie à cinq ans est sensiblement plus élevée chez les femmes (63 %) que chez les hommes (44 %). Une divergence due en partie au fait que les cancers féminins sont généralement plus faciles à traiter.
Des chiffres noirs.
Deuxième facteur : la localisation du cancer. Les pathologies sont très inégalement guéries. Au « top » : les cancers de la thyroïde, du testicule et de la lèvre, avec 95 % de survie. En bas du tableau : les mésothéliomes de la plèvre, les cancers du foie et du pancréas, entre 5 et 10 % de survie. Quant aux cancers les plus fréquents, ils sont à tous les niveaux de l'échelle ; si l'on survit au cancer du sein à 84 %, au cancer de la prostate à 77 %, le cancer colo-rectal et le cancer du poumon entraînent une forte mortalité (56 % de survie pour le premier, 14 % pour le second).
Des chiffres «noirs» qui montrent l'étendue du chemin à parcourir. «Il n'y a pas lieu de faire du triomphalisme», commente Henri Pujol, président de la Ligue, qui invite à ne pas oublier ces pathologies.
Autre information qui ressort de l'enquête : l'amélioration de la survie de certains cancers, comme celui du sein ou de la prostate, qui bénéficient d'un bon dépistage.
Si les résultats globaux corroborent des estimations précédemment publiées, cette étude fait date en ce qu'elle constitue un socle de données qui fera référence, alignant la France sur l'appareil statistique des autres pays européens.
Avec ce travail, qui a duré dix ans et coûté 1,7 million d'euros, «la France a à peu près rattrapé son retard», estime Pascale Grosclaude, responsable du projet pour la Ligue contre le cancer et responsable du registre des cancers du Tarn. Prochainement seront publiés les résultats de survie à dix ans.
Aussi solide soit-elle, l'enquête a aussi ses limites : les disparités liées à l'origine géographique et à l'appartenance sociale du patient sont des paramètres encore peu pris en compte.
L'étude n'inclut pas non plus le paramètre du stade d'extension de la maladie lorsqu'elle est diagnostiquée. Des compléments du dossier qui verront peu à peu le jour grâce à ces premiers travaux, assurent les responsables de l'enquête.
Une enquête inédite
L'étude concerne une population de 205 000 patients âgés de plus de 15 ans. Menée, grâce au réseau Francim, dans les quatorze départements disposant de registres du cancer, elle a porté sur tous les cas diagnostiqués sur la période 1989-1997, avec une mise à jour du statut vital au 1er janvier 2002, afin d'observer la survie à cinq ans. Plus de quarante pathologies cancéreuses ont été étudiées.
Le décès d'une personne atteinte d'un cancer étant parfois dû à d'autres causes que la maladie, le calcul de la survie prend en compte une correction, qui donne au final un taux de survie dit « relative ».
L'étude, éditée par Springer, est en vente dans les librairies spécialisées au prix de 30 euros.
Consultez le résumé de l'étude
Source : Ligue contre le cancer
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