Le Pr Denis Malvy, du service des maladies infectieuses et tropicales au CHU de Bordeaux, doit présenter ce mercredi en session « late breaking » de la conférence internationale sur les rétrovirus et les infections opportunistes (CROI) de Seattle, les résultats de l’essai JIKI de phase II sur l’efficacité du favipiravir dans le traitement des infections par le virus Ebola.
« Il faudra maintenant compter avec le favipiravir », a-t-il annoncé au « Quotidien du Médecin », tout en précisant qu’il fallait rester prudent et « blinder » les résultats en augmentant le nombre de patients traités dans l’essai qui se poursuit dans les centres de Guékédou, Nzérékoré, Macenta et dans le centre de traitement des soignants de Conakry.
« Nous allons nous retourner vers les collègues qui travaillent au Sierra Leone et au Liberia pour avancer vers une évaluation plus complète à travers des combinaisons », poursuit-il. Le Favipiravir est un inhibiteur de polymérase, la communauté scientifique va devoir se tourner vers des médicaments ayant un mode d’action complémentaire afin de « trouver une efficacité chez les patients où le favipiravir en monothérapie ne fonctionne pas ».
Une mortalité divisée par deux
Le 16 janvier dernier, le comité indépendant de l’étude a constaté que le nombre de 80 participants (69 adultes et 11 enfants) prévu au début de l’essai, en décembre, avait été atteint. Un peu plus de la moitié de ces patients, 58 %, avaient une charge virale inférieure à 108 copies par millilitre de sang.
Les auteurs ont observé que 15 % de ces patients étaient décédés au bout de trois semaines contre 30 % chez des patients similaires traités dans ces mêmes centres avant l’introduction de cet antiviral, soit une réduction de moitié. Les patients traités n’ont pas été épargnés par la forme aiguë de la maladie, puisque 42 % d’entre eux ont souffert d’insuffisance rénale.
Inefficaces lorsque la charge virale est élevée
Par ailleurs, 95 % des participants ayant une charge virale supérieure à 108 copies par millilitre de sang sont décédés alors que ce n’était le cas que de 85 % des patients ayant les mêmes caractéristiques arrivés dans les semaines qui précédaient l’introduction du favipiravir.
Le favipiravir ne semble donc pas efficace chez les patients pris en charge tardivement. Avec cette catégorisation en deux groupes définis par leurs charges virales, les médecins peuvent mieux délimiter la place des monothérapies antivirales dans l’arsenal thérapeutique contre la maladie.
Les adultes ont reçu 2 400 mg de favipiravir au moment de leur arrivée dans le centre, puis 2 400 mg au bout de huit heures, 1 200 mg au bout de 16 heures et enfin 1 200 mg deux fois par jours. Les enfants recevaient eux une dose ajustée à leur poids.
L’ouverture aux autres centre encore en discussion
Au début du mois, le coordinateur national de la lutte contre Ebola, le Dr Sakoba Keïta, avait annoncé que le traitement avait commencé à être utilisé au centre de traitement de Coyah qui comporte de nombreux malades depuis le déplacement du centre de gravité de l’épidémie.
« Pour le moment, le favipiravir n’est dispensé que sur les sites de l’essai, corrige le Pr Denis Melvy. Les autorités guinéennes se sont montrées très enthousiastes mais, dans l’immédiat, il faut surtout confirmer le signal que nous avons observé et donc continuer la prescription de manière contrôlée. »
Il est toutefois possible que la Guinée mette en place l’équivalent d’une ATU pour traiter les malades du centre de Coyah, avec des conditions drastiques identiques à celle de l’essai. « On peut très bien imaginer que le favipiravir intègre le "standard of care" des centres de traitement, où l’on pourrait alors expérimenter des thérapies complémentaires », estime le Pr Denis Malvy.
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