« Les sages-femmes pourront participer à la prise en charge de l’interruption volontaire de grossesse (IVG) médicamenteuse », a annoncé Marisol Touraine lors de la présentation des orientations de la loi de santé, le 19 juin.
Aujourd’hui, l’IVG médicamenteuse est pratiquée en cabinet jusqu’à 7 semaines d’aménorrhée ou en établissement (9 semaines) par des gynécologues ou des généralistes ayant signé une convention avec un établissement.
L’annonce n’a suscité aucune réaction officielle. Elle semble faire consensus, tant dans le milieu des sages-femmes que chez les médecins. « Il n’y a aucun lien avec le mouvement de grève. C’est une revendication de longue date, qui avait été proposée lors de la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) mais retoquée sous la pression de lobbies anti-IVG », met en perspective Élisabeth Tarraga, présidente de l’Organisation nationale des syndicats de sages-femmes (ONSFF).
« Cette décision représente une avancée pour l’accès aux soins des femmes et leur droit de disposer de leur corps à laquelle l’Ordre ne peut qu’être favorable », réagit la présidente de l’Ordre des sages-femmes, Marie-Josée Keller.
Légaliser une situation existante
« Cela viendrait légaliser une situation qui existe déjà dans les faits, dans les établissements, ou dans les centres de planning familial, où il y a de moins en moins de médecins », explique Sophie Foucher, présidente de l’Union nationale des syndicats de sages-femmes (UNSSF). Déjà en 2007, selon une enquête de la DREES, 85 % des sages-femmes des petits établissements (- de 250 IVG annuels) et 61 %, dans les gros établissements (+ de 1 000 IVG par an), participaient « de façon importante » à des interruptions volontaires de grossesse médicamenteuses, sous délégation du médecin.
« C’est notre rôle d’accompagner les femmes en bonne santé ; nous pouvons faire une déclaration de grossesse. L’IVG médicamenteuse de femmes en bonne santé doit donc être reconnue dans nos compétences », réagit Madeleine Moyroud, présidente de l’Association nationale des sages-femmes libérales (ANSFL).
Chez les médecins, le Dr Jean Marty, président du Syndicat national des gynécologues obstétriciens de France (SYNGOF), n’y voit rien à redire. « Les grossesses normales sont dans les prérogatives des sages-femmes. L’ouverture de l’IVG médicamenteuse aux sages-femmes s’inscrit dans la règle et la normalité, nous n’avons pas de réaction à avoir », commente-t-il.
Flou sur les moyens
En revanche, les sages-femmes restent vigilantes sur les modalités finales. « Nous n’avons pas été consultés et nous attendons davantage de précisions quant à la mise en œuvre de cette nouvelle compétence », déplore l’Ordre. « Dire que nous participerons à la prise en charge de l’IVG médicamenteuse, qu’est-ce que cela signifie ? », s’interroge Élisabeth Tarraga. Pas question de délégations de tâches, puisque la profession est médicale.
Marjorie Agen, présidente de l’Association nationale des sages-femmes orthogénistes (ANSFO), détaille l’étendue de leurs revendications : « Nous voulons recevoir la parole des femmes dès la première consultation qui ouvre le délai de réflexion de 8 jours, assurer les consultations psychosociales, et réaliser l’IVG médicamenteuse. » L’ANSFO est même favorable à l’ouverture aux sages-femmes de l’IVG chirurgicale, afin de donner le choix aux femmes, une proposition qui ne fait pas consensus dans la profession.
Celle-ci se rassemble néanmoins sur la demande d’une rémunération ad hoc. « Les questions financières n’ont pas été évoquées, c’est le flou artistique. Il faudra que ce soit une cotation CCAM, nous demanderons à ce qu’elle soit identique à celle des généralistes et des gynécologues », indique la présidente de l’ONSSF.
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