«L’idée selon laquelle la santé métabolique puisse être améliorée par l’activation des cellules immunitaires dans la graisse est assez étonnante, commente le Dr Bruce Spiegelman de la Harvard Medical School (Boston), l’auteur principal de l’une des deux études publiées dans le même numéro de Cell rapportant le rôle central du système immunitaire dans l’activation de la graisse brune. Cette recherche révèle une nouvelle classe de traitements potentiels qui pourraient un jour être utilisés pour traiter l’obésité et les troubles métaboliques associés».
On sait depuis peu que les adultes humains hébergent au sein de la graisse blanche, connue pour stocker les calories, une graisse brune qui brûle les réserves de calories en produisant de la chaleur (thermogenèse). Cette « bonne » graisse qui protège ainsi contre l’hypothermie et les troubles métaboliques est ainsi devenue une cible intéressante pour traiter l’obésité.
Sachant que l’exposition au froid stimule la production de graisse beige chez les hommes et les souris, l’équipe de Yifu Qiu et Ajay Chawla, de l’Université de Californie (San Francisco), a recherché par quel mécanisme. Les chercheurs ont établi, chez la souris, que la production de graisse beige induite par le froid nécessitent deux cytokines, l’IL-4 et l’IL-13. Celles-ci entraînent le recrutement de macrophages, qui vont convertir la graisse blanche stressée par le froid en graisse beige en produisant des catécholamines. Dans une expérience, ils ont administré l’IL-4 aux souris pendant 2 semaines, et ont constaté une augmentation de la graisse beige et une perte de poids.
Double action
L’équipe de Rajesh Rao, elle, s’est intéressée à la protéine PGC-1alpha4, récemment identifiée, qui favorise la croissance musculaire en réponse à l’exercice. Ils ont découvert que PGC-1alpha4 stimule la sécrétion d’une protéine appelée meteorin-like (Metrnl). La meteorin-like se révèle être une hormone produite dans le muscle après l’exercice et dans le tissu adipeux après exposition au froid. L’injection de cette hormone chez la souris permet d’obtenir les mêmes effets que l’exercice : réduction de la masse graisseuse de 25 %, perte de poids même sous régime riche en graisses, amélioration du contrôle glycémique, thermogenèse, et activation des gènes associés aux cytokines anti-inflammatoires. Ils ont également découvert que la météorine-like induit la production des cytokines Il-4 et IL-13 et stimule l’activation des macrophages dans le tissu adipeux, convertissant ainsi la graisse blanche en graisse beige.
Deux ans après l’irisine
Les deux équipes ont ainsi convergé vers la même voie immunitaire selon deux approches différentes.
«Étant donné la capacité de Metrnl à induire la thermogenèse de la graisse brune, son potentiel thérapeutique dans les maladies métaboliques est évident », concluent les auteurs. Cette découverte vient deux ans après celle de Spiegelman et coll. d’une autre protéine, l’irisine produite dans les muscles après un exercice d’endurance, alors que la sécrétion de Metrnl est stimulée par l’exercice de résistance. L’irisine favorise aussi la conversion en graisse brune et la perte de poids chez la souris, et améliore la tolérance au glucose. Du point de vue du développement thérapeutique, « il est bon d’avoir des molécules qui agissent par différentes voies », estime Spiegelman. L’irisine est étudiée comme un potentiel traitement potentiel pour l’obésité et le diabète de type 2.
Cell 5 juin 2014, Qiu et coll., Rao et coll.
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