L'article du « BEH » (n° 33 du 2 septembre) comble une lacune épidémiologique, alors que les seules études disponibles jusqu'à présent étaient partielles et hétérogènes (limitées à certaines fédérations sportives ou à des déclarations d'assurances). Pour la première fois en France est calculé le taux d'incidence annuel (TI) des accidents liés à l'ensemble des sports, tous âges et toutes pratiques confondues : 15,1 accidents pour 1 000 personnes, 22 pour 1 000 chez les hommes et 8,6 pour les femmes, avec une pointe à 37 pour 1 000 chez les jeunes de 15 à 24 ans. Ces TI correspondent en effectif à 910 000 accidents de sport qui surviennent chaque année en France, frappant 640 000 hommes et 270 000 femmes.
Pour arriver à ces chiffres, les responsables de l'EPAC, le Dr Bertrand Thélot, Cécile Ricard et Annabel Rigou, ont étudié l'enregistrement des services d'urgences pour accidents de la vie courante (AcVc) dans 12 hôpitaux de France*, en 2004 et 2005 ; y sont collectés de façon exhaustive l'âge, le sexe, la résidence, le profil social de la personne accidentée, les caractéristiques de l'accident (mécanisme, lieu, activité, lésion, partie lésée) et, s'il y a lieu, le type de sport pratiqué. Pour 2004-2005, cette base de données a totalisé 179 676 admissions, dont 32 007 (17,8 %) après des accidents de sport, des chiffres que les auteurs ont extrapolé à l'ensemble de la population française.
Les chutes causent 60 % des accidents.
Plus de 2 accidents sur 5 (43 %) sont survenus lors de pratiques de sports d'équipe : le football (70 %), puis le basket-ball (10 %), le rugby (9 %), le handball (7 %) et le volley-ball (3 %). Les sports impliquant un véhicule à roues sans moteur ont totalisé 20 % des accidents (le vélo pour 74 % d'entre eux, devant le roller pour 18 % et le skateboard pour 7 %). En sports individuels, l'équitation et les sports d'hiver arrivent en tête des disciplines accidentogènes. L'analyse des mécanismes accidentels montre que les chutes sont les causes les plus fréquentes (60 %), particulièrement nombreuses pour les accidents de vélo (91 %), les sports d'hiver (83 %) et l'équitation (81 %). Les coups portés dans un sport d'équipe ou de combat sont constatés plus d'une fois sur trois. Les surmenages physiques aigus (étirement, élongation…) sont surtout signalés lors de la pratique d'un sport de raquette (20 %), d'athlétisme (19 %) ou de gymnastique (16 %).
Les lésions touchent en grande majorité les membres, inférieurs (41 %) et supérieurs (37 %), la tête n'étant atteinte que lors de 13 % des accidents, plus que le tronc (8 %). Ce sont les entorses qui sont les plus fréquentes pour les sports d'équipe (36 %), l'athlétisme (34 %) et les sports de raquette (31 %). Dans les autres sports, les contusions arrivent en tête (41 % pour l'équitation, 32 % pour les sports d'hiver). Ce sont encore l'équitation et les sports d'hiver qui enregistrent la proportion la plus élevée de fractures (29 %), devant le vélo (27 %).
La moitié des sportifs adressés aux urgences (49 %) retournent chez eux après examen, sans qu'un suivi ne soit nécessaire. Quarante-quatre pour cent devront revenir consulter, en ville ou à l'hôpital. Et 7 % seront hospitalisés, principalement pour les pratiquants des sports d'hiver et les cavaliers.
La durée moyenne de séjour atteint 3,5 jours (moins de 2 jours pour les sports de combat et nautiques, jusqu'à 4,6 jours pour les sports d'hiver).
Malgré les limites de l'enquête, liées au faible nombre d'hôpitaux participants parmi les 610 services d'urgence qui fonctionnent en France, avec des spécificités régionales, les auteurs soulignent qu'ils aboutissent à des résultats comparables à ceux de l'enquête menée dans la population générale pour le baromètre santé 2008 de l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé. Des résultats qui mettent en évidence le nombre élevé des accidents de sport, alors que la pratique sportive est en plein essor : 15 millions de personnes sont aujourd'hui licenciées au sein d'une fédération et 36 millions de Français âgés de 15 à 75 ans déclarent pratiquer une APS (activité physique ou sportive), selon une enquête du ministère de la Jeunesse et des Sports (bulletin statistique n° 01-01, 2001). «Les bienfaits des pratiques sportives doivent être mis en balance avec le risque de survenue d'accidents et, dans ce contexte, des travaux épidémiologiques et des programmes de prévention sont à favoriser», conclut le « BEH », qui recommande de mener des études spécifiques par type de sport et de chiffrer le nombre des décès, ainsi que celui des porteurs de séquelles graves.
* Annecy, Besançon, Béthune, Le Havre, Paris, Saint-Paul de la Réunion, Vannes, Bordeaux, Limoges, Marseille et Versailles .
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