CHAQUE JOUR, EN FRANCE, plus d’un million de soignants utilisent des dizaines de milliers d’aiguilles ou de cathéters courts, afin de donner les soins nécessaires aux patients traités dans les établissements de santé et en médecine ambulatoire. Or ils ont souvent recours à des dispositifs médicaux non sécurisés, faute d’une législation ad hoc. Il s’ensuit de nombreuses piqûres ou coupures. Des accidents d’exposition au sang (AES) qui peuvent se révéler mortels, compte tenu de la présence d’agents pathogènes.
Des maladies allant des fièvres et infections bactériennes à des pathologies particulièrement graves comme le sida ou les hépatites B ou C, et leur évolution possible vers un cancer du foie, font partie des dangers avérés. Les statistiques officielles parlent de plusieurs dizaines de séroconversions professionnelles déclarées, dont treize prouvés de sida et cinquante-deux d’hépatite C. Une étude publiée en juillet 2005 évalue à 7,5 pour 100 lits dans les établissements publics et à 30 pour 100 lits dans le privé le nombre annuel d’AES dont seraient victimes les intervenants hospitaliers. Soit 147 000 AES par an, qui touchent tout particulièrement les infirmières et les aides-soignantes. Et tous les accidents ne sont pas comptabilisés, soit parce qu’ils n’ont pas été reconnus, soit parce que les blessés négligent de se faire connaître. Lorsqu’un accident est déclaré, des protocoles de diagnostic, de suivi et de prophylaxie sont mis en place automatiquement. Les examens et les traitements sont longs et pénibles (trithérapie, chimiothérapie, etc.), tant pour la victime que pour son entourage, y compris dans le cas ou aucune séroconversion n’apparaît.
L’obligation de sécurité.
Face à ce risque majeur et évitable, longtemps sous-estimé, la formation des professionnels de santé ainsi que la planification des soins et l’ergonomie du poste de travail sont indispensables, mais pas suffisants. Les actions de prévention doivent être «étroitement associées à l’utilisation de dispositifs sécurisés»*, affirme Jacques Domergue, député UMP de l’Hérault, auteur d’une proposition de loi qui impose aux chefs d’établissement de soins de mettre ces derniers à la «disposition de (leur) personnel». Là où ils existent, ils apportent déjà des «résultats décisifs».
Le parlementaire, qui préside le Conseil national de la chirurgie et le groupe d’études sur les technologies médicales à l’Assemblée, rappelle qu’une enquête multicentrique réalisée dans 32 hôpitaux en 1999-2000 montre que l’usage de dispositifs de protection adaptés permet de diviser par quatre l’incidence des piqûres.
La proposition de loi Domergue a pour objectif d’insérer dans le code du travail et dans le code de la santé publique des «mesures de protection particulières aux personnels de santé», que seraient tenus de faire appliquer les chefs d’établissement de soins au nom de l’ «obligation de sécurité». Le député médecin espère qu’elle pourra être examinée au cours de l’actuelle législature.
* En décembre 2005, le Snitem (Syndicat national de l’industrie des technologies médicales) estimait que, malgré les progrès réalisés dans les hôpitaux (collecteurs d’aiguilles, seringues sécurisées...), moins d’une aiguille sur dix était protégée.
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