LE DÉLUGE est, comme on le sait, l’épisode biblique (Genèse) qui évoque l’envahissement de la terre par les eaux et particulièrement l’histoire de l’arche de Noé. Il s’agit également d’un nom commun qui se rapporte à une pluie diluvienne, à une tempête torrentielle. Au fil de l’histoire de l’art, les peintres ont représenté le déluge dans l’acception souvent très large du terme. Et là est l’intérêt de cette exposition : montrer toutes sortes de déluges, qu’ils soient historiques, religieux, allégoriques, prétextes à la peinture de paysages…
Aux XVIe et XVIIe siècles, les artistes flamands s’intéressent aux causes du déluge qu’ils interprètent comme la réponse de Dieu aux péchés, aux faiblesses, aux crimes et aux violences des hommes. Jan Brueghel l’ancien, dans sa peinture sur cuivre du « Déluge avec l’arche de Noé » (1601), imagine une foule foisonnante de personnages affolés, représentés avec une exceptionnelle minutie. En Italie, de nombreux artistes mêlent la chair à leurs visions du déluge : les corps s’entremêlent dans la frayeur, les anatomies robustes bandent leurs muscles dans leurs efforts pour secourir les victimes des terribles inondations (voir l’étude au crayon pour « le Déluge » de Jacopo Carucci Pontormo ou « le Déluge » d’Alessandro Turchi). Puis Nicolas Poussin apporte sa propre vision de la catastrophe mythique, et on assiste à un tournant dans l’évocation du sujet. Sa toile « le Déluge » ne se trouve pas dans l’exposition, mais elle y est évoquée par une copie de Pierre Peyron (1744-1814). Le déluge est ici figuré par un paysage classique, équilibré, sobre, serein et allégorique. Rien à voir avec les visions apocalyptiques qui suivront.
Entre science et religion.
Durant les vingt dernières années du siècle des lumières, le thème du déluge suscite un fort engouement. Jean-Baptiste Regnault peint un somptueux « Déluge », expressif (vers 1789) ; Claude Joseph Vernet, dans le sien, très stylisé, joue avec le mouvement des corps, des vagues et d’un bateau qui s’échoue au loin. D’autres catastrophes naturelles deviennent alors assimilées au déluge : Pierre-Henri de Valenciennes représente en 1813, dans une toile incandescente, l’éruption du Vésuve et la mort de Pline ; Louis-Jean Deprez évoque vers 1783 le tremblement de terre de Messine.
Au XIXe siècle, le débat entre science et religion fait rage. On tente de trouver une explication rationnelle au déluge. Géricault peint une « Scène de déluge » étonnamment moderne, dans une lumière fantastique, irradiante ; Girodet, dans une étude, fait preuve de lyrisme, d’un style qu’on oserait presque qualifier d’expressionniste. Les peintres anglais Turner et Füssli transcendent le thème, le premier selon une vision grandiose et dramatique, le second en représentant des personnages sublimés, héroïques, aux chairs mordorées. L’exposition dévoile également un bel ensemble d’exemplaires de Bibles et d’histoires sacrées (notamment « la Sainte Bible » de Gustave Doré en 1866). Ces oeuvres cataclysmiques ont une valeur symbolique. Elles expriment l’immensité de l’univers, la grandeur de la nature, la précarité de l’homme, l’angoisse de l’apocalypse.
> DAPHNÉ TESSON
Musée Magnin, 4, rue des Bons-Enfants, 21000 Dijon. Tél. 03.80.67.11.10. Entrée : 4,70 euros (TR : 3,70 euros). Jusqu’au 10 janvier 2007. Catalogue, 128 p., 29 euros, éd. RMN.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature