LES CONSEQUENCES des toxiques comportementaux sur la santé générale font l’objet de nombreuses recherches depuis plusieurs années. Et plus particulièrement le tabac qui est, après l’alcool, l’une des substances psychoactives les plus consommées en France. Les toxiques comportementaux sont définis en fonction de leurs effets sur le cerveau, a rappelé le Dr Jacques de Mouzon (Inserm U569, Le Kremlin- Bicêtre). Trois catégories ont été individualisées : les stimulants, les hallucinogènes ou perturbateurs et les dépresseurs. Vaincre l’angoisse, améliorer les performances, résoudre des difficultés de comportement ou le simple effet ludique sont les principales raisons de la consommation de ces toxiques. Selon l’enquête Escapad*, réalisée en 2002-2003, 28 % de la population générale consomme régulièrement du tabac, 28 % de l’alcool, 8 % des psychotropes et 1 % du cannabis. Quant aux jeunes de 17 à 18 ans, 93 % ont déjà expérimenté le tabac, 78 % l’alcool, 53 % le cannabis, 26 % les médicaments psychotropes et de 1 à 3 % des drogues dures. Le tabagisme commence en général très tôt dans la vie, vers 12-13 ans, et s’accentue jusqu’à 18 ans. On note une diminution globale de la consommation de tabac chez les femmes (32 % en 1986, 25 % en 2002) et un arrêt fréquent pendant la grossesse (63 %).
Effets néfastes de la période préconceptionnelle à la période postconceptionnelle.
Les effets de l’intoxication tabagique sur la reproduction, en dehors de la grossesse, ne sont étudiés que depuis quelques années. Les données de la littérature doivent être analysées avec précaution, a précisé le Dr Sandrine Sépaniak (centre d’assistance médicale à la procréation, maternité régionale et universitaire A.-Pinard, Nancy), en raison de multiples biais liés à la quantification du tabagisme, à l’existence d’autres facteurs potentialisant les effets du tabac, au caractère multifactoriel de l’infertilité. De plus, le nombre très important de substances – plus de 4 000 – qui entrent dans la composition du tabac rend complexe la compréhension de ses mécanismes d’action.
Chez la femme, le tabagisme est associé à une diminution de la fertilité, de l’ordre de 15 à 40 % suivant les études. Plusieurs travaux ont montré une corrélation négative entre tabagisme et fertilité spontanée. Le taux cumulatif des grossesses à un an est diminué de 15 % et le délai pour concevoir un enfant est augmenté de six mois à un an. Ces risques seraient proportionnels à la consommation de tabac et réversibles à l’arrêt de l’intoxication. Certains auteurs ont fait état d’un risque de fausse couche augmenté en raison d’une altération de la fonction lutéale. La ménopause est plus précoce de 2 ans en moyenne chez les fumeuses et la prévalence de la défaillance ovarienne prématurée y est plus importante. L’assistance médicale à la procréation (AMP), et plus particulièrement la fécondation in vitro (FIV), a permis des analyses plus fines de la qualité ovocytaire. Il y aurait une diminution du nombre des ovocytes, du taux d’implantation et du taux de grossesses en cas d’intoxication tabagique. Les ovocytes seraient altérés. Les enfants issus de mère fumeuse seraient également touchés par les effets négatifs du tabac : le risque de mort subite du nourrisson est accru, la mortalité infantile à un an est augmentée, la réceptivité des enfants aux infections respiratoires est majorée.
Le tabac pourrait également avoir des répercussions sur les capacités de reproduction des enfants issus de mère fumeuse, avec des altérations des paramètres spermiologiques chez les jeunes hommes et une diminution de la fécondité chez les jeunes filles.
Comme pour les femmes, une diminution du pouvoir fécondant liée à l’altération du sperme a été constatée chez les fumeurs. Mais les résultats sont assez hétérogènes. Plusieurs équipes ont observé une tendance à l’oligospermie. Certains travaux font état d’une diminution de la vitalité des spermatozoïdes, d’autres d’une altération de leur morphologie.
L’AMP a permis de préciser davantage les conséquences du tabac sur la fertilité masculine. Pour les hommes fumeurs, une morphologie anormale des embryons a été rapportée, de même qu’une augmentation du nombre de fausses couches. D’autres travaux ont mis l’accent sur la relation entre le tabagisme paternel préconceptionnel et l’apparition de certains cancers (leucémie, lymphome, tumeur cérébrale) chez les enfants de 0 à 5 ans. Cette relation n’existe pas si le tabagisme commence après la naissance.
Nécessité d’une prise en charge par les professionnels de santé.
Un interrogatoire et des tests simples peuvent être proposés pour déterminer l’importance du tabagisme et ses répercussions. La mesure du taux de monoxyde de carbone expiré par le CO-tester, test rapide, non invasif et peu coûteux, permet d’obtenir un bon reflet de l’intoxication tabagique. La prise en charge doit être active, a conclu le Dr Sépaniak, et les professionnels de santé doivent se mobiliser pour obtenir un sevrage tabagique total et définitif, notamment en assistance médicale à la procréation.
* Escapad : Enquête sur la santé et les consommations lors de l’appel de préparation à la défense.
Tom et Jerry sans fumée
Tom le chat et Jerry la souris pourront continuer à s’aplatir et à se trucider à la télévision britannique, mais ne pourront plus y fumer, selon une décision de l’Ofcom, l’autorité publique de régulation des programmes. La plainte d’un téléspectateur anonyme concernant deux épisodes diffusés par la chaîne Boomerang consacrée aux classiques du dessin animé a poussé l’Ofcom à rappeler que les diffuseurs encourent des amendes s’ils présentent des dessins animés dans lesquels fumer est «encouragé, présenté, glamourisé ou excusé». La chaîne n’a pas été sanctionnée : «Nous reconnaissons que, dans Tom et Jerry, le fait de fumer est généralement présenté de manière stylisée et n’est généralement pas encouragé», a précisé l’Ofcom, en admettant aussi que les épisodes dataient d’une époque où fumer était moins controversé.
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