DU 28 NOVEMBRE au 9 décembre se tiendra à Montréal une conférence des Nations unies sur les changements climatiques, la première depuis l'entrée en vigueur officielle du protocole de Kyoto sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre, le 16 février dernier. Comme l'a alors souligné Kofi Annan, « le protocole, à lui seul, ne suffira pas à sauver l'humanité des dangers du changement climatique, l'un des plus grands défis du XXIe siècle ». Et la mise en œuvre du protocole, comme son calendrier, font l'objet de discussions et de tractations difficiles entre les pays signataires (140, mais seulement 55 l'ont ratifié à ce jour), notamment en ce qui concerne les permis d'émission. Les Etats-Unis, en particulier, sont réticents à imposer des contraintes à leurs industriels.
Pour les auteurs d'une étude publiée aujourd'hui dans « Nature », c'est pourtant une obligation morale pour les pays aux émissions les plus fortes, tels que les Etats-Unis et les nations européennes, de mener le combat. « Les pays les moins capables de faire face et les moins responsables des gaz à effets de serre sont les plus touchés » par les conséquences du réchauffement climatique, souligne Jonathan Patz (University of Wisconsin, Nelson Institute for Environmental Studies). Et de citer les côtes du Pacifique et de l'Océan Indien et l'Afrique subsaharienne. « La plupart des graves maladies qui touchent les pays pauvres, du paludisme aux diarrhées et à la malnutrition sont hautement sensibles au climat », renchérit l'un des coauteurs, Diarmid Campbell-Lendrum (OMS).
150 000 morts par an.
Les scientifiques prévoient pour la fin du siècle une hausse des températures située entre 1,4 et 5,8 degrés. Selon un récent rapport de l'ONU, les changements climatiques dus aux activités humaines entraînent déjà plus de 150 000 morts par an. Les prévisions sont encore plus inquiétantes : le risque de pathologies liées au climat aura plus que doublé en 2030, les inondations affecteront la vie de 200 millions de personnes dans les années 2080, le nombre de décès liés à la chaleur en Californie pourrait plus que doubler d'ici à 2100.
Dans leur rapport, Patz et coll. passent en revue les différents risques. Les vagues de chaleur comme celle qui a touché l'Europe en 2003 vont se multiplier*, augmentant diverses pathologies non infectieuses, surtout quand les journées très chaudes surviennent en début de saison. Les sécheresses seront encore plus redoutables pour de nombreux pays africains, augmentant encore les risques de malnutrition ou de famine. Ailleurs, l'urbanisation galopante multiplie les possibles « îlots de chaleur » en ville (avec des températures au niveau de l'asphalte ou des toits supérieures de 20 ou 30° à celles de l'air) et les zones habitées qui peuvent être touchées par les ouragans sur les côtes.
Du côté des maladies infectieuses, de nombreux vecteurs répondent à des mécanismes thermosensibles. Le paludisme, la dengue en sont des exemples connus, même si l'influence à long terme des tendances climatiques reste à préciser. Les grands événements climatiques, comme les oscillations d'El Niño, ont aussi un impact : il a été montré sur le paludisme en Amérique du Sud, la fièvre de la vallée du Rift en Afrique de l'Est, la dengue en Thaïlande, l'infection à Hantavirus dans le sud-ouest des Etats-Unis, les diarrhées d'origine hydrique au Pérou ou encore le choléra au Bangladesh.
Si les Etats ont un rôle fondamental à jouer, les individus ne sont pas déchargés de toute responsabilité. « Nos styles de vie pernicieux ont un impact mortel sur d'autres personnes dans le monde, insiste Patz. Il y a des moyens pour mener des vies plus économes en énergie. »
* Selon une étude publiée en 2004 dans « Science », la fréquence des vagues de chaleur augmentera de 31 % à Paris d'ici à 2090 et leur durée passera de 8-13 jours à 11-17 jours.
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