Le Burkina, avec une séroprévalence du VIH entre 7 et 8 %, est le deuxième pays le plus touché d'Afrique. Ce taux connaît depuis plusieurs années une croissance inquiétante. Le traitement des patients est aujourd'hui un axe prioritaire de la lutte contre la pandémie. Une meilleure accessibilité aux médicaments est indispensable, mais l'objectif ne saurait être atteint sans l'appui de systèmes de santé et de distribution efficaces.
L'action de la Croix-Rouge et de l'OPALS s'inscrit dans cette logique. Depuis 1998, ces deux organismes ont signé une convention-cadre dans l'objectif d'optimiser leurs interventions en Afrique. Ils ont élaboré un instrument commun : le centre de traitement ambulatoire (CAT), structure souple animée par des professionnels locaux et modélisée à partir d'une connaissance des réalités sanitaires et sociales africaines. Aujourd'hui, il en existe huit en Afrique, dont deux au Burkina : le premier, à Ouagadougou, a été créé il y a plus de deux ans, le second a été inauguré en décembre 2002.
Près de 25 % des patients concernés
Ces centres burkinabé ont bénéficié du financement de la fondation Jacqueline Beytout, engagée depuis deux ans et demi dans ce pays.
Aujourd'hui, le CTA de Ouagadougou, conçu pour 600 à 800 patients, compte une file d'attente de 2 000 patients. Stéphane Mantion, conseiller technique de la Croix-Rouge, explique au « Quotidien » : « Il fallait résoudre ce problème de l'engorgement des centres. Près de 25 % des patients reviennent au centre pour un renouvellement d'ordonnance ou pour un problème qui aurait pu être résolu rapidement en dehors du centre. »« Lorsque l'on a soumis le problème à Jacqueline Beytout, sa réponse a été immédiate : il faut faire de l'ambulatoire ambulant », ajoute-t-il.
Le concept était défini, il ne restait plus qu'à imaginer un outil suffisamment efficace pour assurer la même qualité de prestation.
Le projet prend la forme de 2 véhicules-laboratoires (4x4 Kangoo express) modulables et simples pour chacun des deux centres. « Nous allons procéder à une expérimentation grandeur nature, assure Stéphane Mantion. Chaque équipement est un peu différent. Au bout de huit mois, nous choisirons la solution la plus adaptée. » L'une des voitures est équipée de panneaux solaires, alors que l'autre bénéficie d'une batterie supplémentaire. De même, les techniques de production du froid ou d'alimentation en eau sont différentes d'un 4x4 à l'autre.
Mais l'innovation majeure tient à l'aménagement arrière équipé en un laboratoire mobile, avec un microscope binoculaire pour le diagnostic de paludisme et un compteur lymphocytaire pour les CD4.
Ce compteur présente l'avantage de ne pas nécessiter de chaîne de froid et d'être moins coûteux que les compteurs utilisés jusqu'ici dans les CTA (2 euros, contre 20 euros). Un logisticien (assistant sanitaire) et un psychologue ou un infirmier seront chargés, en collaboration avec les CTA, de sillonner les villages avoisinants.
Jacqueline Beytout, qui a fondé le centre Viggo-Petersen à Lariboisière il y a quelques années, affirme son engagement auprès des malades : « Seul le malade compte. A Lariboisière, les patients devaient faire deux ou trois fois le même trajet avant d'avoir un diagnostic. » Aller vers le patient, afin de lui assurer un meilleur confort et augmenter le nombre de patients nouveaux pris en charge par le CAT, tel est le sens de son nouveau projet. Si elle reste discrète sur les raisons de son engagement au Burkina, elle affirme : « A propos de l'Afrique, on entend souvent parler de ce que l'on va faire. Nous avons décidé, avec le Pr Gentilini, d'agir et de faire ce que nous pouvons faire et le plus vite possible. »
Si l'expérience marche, elle pourra s'étendre aux autres CTA en Afrique, au Congo (2), en Côte d'Ivoire, au Sénégal, au Gabon et au Maroc.
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